Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Med'Celine
Derniers commentaires
Archives
26 mars 2012

Champignonite aiguë

demolition Nantes est une belle ville, où il fait bon vivre, paraît-il. Il y règne une politique d'expansion immobilière assez active, et on voit se dresser de plus en plus d'immeubles au design audacieux, ce qui peut vouloir dire à peu près n'importe quoi: novateur ou écolo, abominable ou déjà moche, selon l'humeur du jour. J'avoue avoir un peu de mal à comprendre l'intérêt par exemple de fermer des balcons avec des plaques coulissantes en plexiglas, mais c'est du concept architectural, donc on se tait, s'il vous plaît. Cela n'engage que mon sens de l'esthétisme...

Et puis...

Et puis il y a surtout les "avant". Quand le promoteur immobilier vient marquer de son sceau les maisons qui vont être démolies. De grands panneaux d'affichage déboulent un beau matin, dévoilant en images de synthèse la merveille qui bientôt étendra ses bras vers le firmament. C'est propre, lumineux, et il y a un numéro de téléphone pour les investisseurs. Je dois donc me faire à l'idée que la belle maison bourgeoise au toit pointu du coin de la rue, ou encore la vieille bâtisse où vivent encore quelques anachroniques poules et un coq matinal, vivent leurs derniers jours. Les rideaux disparaissent des fenêtres, des tags apparaissent sur les volets,  dernier baroud d'honneur qui met de la couleur où la poussière règnera bientôt en maître...

Les machines arrivent alors. Elles commencent à arracher des bouts de toiture, défoncent le mur où Pierre et Jeanne notaient scrupuleusement la taille de leurs enfants avec un petit trait au crayon de bois, mois après mois, année après année. Brusque cassure dans les courbes de croissance... La fissure s'élargit, et la machine prend en grippe un lavabo, fracasse le siphon d'où s'échappe l'anneau d'argent, depuis longtemps disparu, que Paul avait offert à Marie pour leurs fiançailles, et qu'on n'avait jamais pensé à chercher là. La chambre de Jules, dont les murs constellés de trous de punaises se retrouvent morcelés et jetés à bas, qui s'en souciera? Pourtant, il en avait mis, des posters d'avions et de voitures, jusqu'à faire disparaître la tapisserie vieillotte, avant de changer d'idoles et de révérer les chanteurs du moment...

Tous ces moments de vie disparaissent sous les coups des pelleteuses, qui escaladent ensuite sans vergogne les tas de gravats informes pour s'approcher un peu plus de leur cible suivante. Ce matin, trois maisons anciennes sont tombées, quelque part à Nantes, et comme d'habitude, j'ai eu ce petit pincement au coeur, cette humidité fugace dans le regard. C'est con, de rendre hommage à un bâtiment, non? Pourtant, je le fais aujourd'hui...

Publicité
Commentaires
P
Je repasse par là après un long moment... Ca fait du bien de te relire, ici et là!<br /> <br /> <br /> <br /> Effectivement Blanche vend, toute la partie maternelle et primaire... c'est énorme. Immeubles de 4/5 étages prévus, le long de la rue du Moulin des Carmes et de la rue de la Tullaye, les maisons à l'angle seront aussi rasées, pour la rentrée 2013 normalement.
Répondre
M
Je crois que tu as raison... Droit devant et la tête haute!<br /> <br /> <br /> <br /> Le plexi, pour le côté maraîcher??? Diantre... Je n'y aurais pas songé! ça m'ouvre des perspectives, du coup! Mais bon sang, que c'est moche!! :D<br /> <br /> <br /> <br /> Blanche aussi? C'est une épidémie, je l'avais dit! Une mycose géante, une amibe, même!<br /> <br /> <br /> <br /> Bonne journée à toi, Aredius!
Répondre
A
Dur, dur... quand je circule à vélo dans Nantes, il m'arrive de détourner le regard pour ne pas voir la démolition. Une fois place nette, on oublie. Alors j'ai la mauvaise habitude de photographier avant le désastre. <br /> <br /> Les communicants font fort. Route de Ste-Luce par exemple, avec leur "Villa-verde" !<br /> <br /> Le plexiglass ... ben, tu ne sais pas ? j'ai lu dans le magazine de notre municipalité que c'est pour rappeler les serres des maraichers qui exerçaient là avant le béton lissé.<br /> <br /> P.S. je viens d'apprendre que le lycée Blanche de Castille va vendre une belle surface de terrain. <br /> <br /> Je vais m'en tenir à regarder droit devant.
Répondre
M
Je me projette toujours : "et si c'était mes souvenirs qu'on étalait comme ça?" Je sais bien que parfois on n'a pas le choix, mais ça fait un sacré pincement au coeur, je comprends, Martine.<br /> <br /> Les pelleteuses sont des monstres sans âme, on leur donnerait presque une volonté propre sans voir les hommes qui les conduisent, et qui peut-être, eux-aussi, ont une petite pensée pour ces tranches de vie qu'ils aplatissent. Ils font juste leur boulot...
Répondre
M
Ah, te revoilà, ça fait plaisir!<br /> <br /> Ma maison est partie, comme ça, de coups de pelleteuse. J'avais 20 ans, j'ai pleuré, c'était trop triste. je me rappelle encore quand je parcourais les pièces, débarrassés de leurs meubles et ce jardin soigné précédemment par mon père et envahi d'herbes folles. Pourtant quand elle n'a plus été qu'un tas de poussière, je suis allée voir ce tas. A sa place, on a construit l'hôtel des impôts! Depuis, je supporte mal de voir ces démolitions, surtout quand je sais que les gens qui ont vécu là y ont laissé tous leurs souvenirs!<br /> <br /> Tu as très bien décrit ce qu'on peut ressentir.
Répondre
Med'Celine
Publicité
Med'Celine
Newsletter
Publicité